Élèves flamands et francophones sèchent les cours pour le climat: "Pourquoi aller en cours si on n'a pas d'avenir ?"

Élèves flamands et francophones sèchent les cours pour le climat: "Pourquoi aller en cours si on n’a pas d’avenir ?"

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Par RTBF

Le jeudi 10 janvier, quelque trois mille élèves flamands de Youth for Climate ont manifesté à Bruxelles afin d'attirer l'attention sur les enjeux climatiques. Ils ont dorénavant décidé de brosser les cours tous les jeudis. Le mouvement devrait donc se poursuivre avec une deuxième manifestation ce jeudi 17 janvier, autorisée par les autorités. 

Si l’initiative est partie du nord du pays, des francophones rejoignent le mouvement. Piero Amand, étudiant en rhéto à Court-Saint-Étienne, en fait partie. A 18 ans, il s'investit dans la cause écologique et considère que "quand les jeunes se mobilisent, ça a beaucoup plus d’impact sur la société et sur les décisions politiques, parce que c’est notre avenir qui est en jeu".

"Montrer qu’il y a une union dans le pays"

"Par rapport à l’écologie et à la planète, on entend plein de choses depuis des années maintenant, et quand les jeunes se mobilisent, ça a clairement un impact sur la société. Les gens se disent que la jeunesse s’est quand même mobilisée, qu’ils ne font pas rien, qu’ils ne s’en foutent pas. Et le fait que ça vienne de Flandre m’a beaucoup intéressé aussi, parce que la Flandre est la région qui a constamment bloqué les dossiers climatiques au niveau fédéral. On sait que le climat est réparti entre les différentes régions et la Flandre est l’une des régions qui a bloqué les dossiers sur ce sujet. C’est donc très positif que ça parte de cette région-là et c’est aussi extrêmement positif qu’ils appellent finalement à ce que tous les jeunes belges, Wallons ou Flamands, se réunissent tous à Bruxelles. Je trouve que c’est important aujourd’hui de montrer qu’il y a une union dans le pays", insiste-t-il. 

Début du mois de décembre, la Belgique a voté contre deux directives européennes pour le climat. En cause, les désaccords entre les Régions sur le sujet, et particulièrement avec la Flandre. Des blocages "extrêmement désolant".

"La Flandre est une région assez riche économiquement et je trouve que c’est vraiment très dommage de bloquer des dossiers climatiques qui sont quand même super importants, primordiaux même, à l’heure d’aujourd’hui."

N’ayez pas peur de prendre des mesures impopulaires

Piero Amand a un message à faire passer aux politiques, "prenez votre courage à deux mains et n’ayez pas peur de prendre des mesures impopulaires".

"Parce que c’est finalement ça qu’on attend, on attend des mesures drastiques, radicales, pour changer la société en profondeur, parce que c’est de ça dont on a finalement besoin. On a besoin d’un changement de paradigme, comme on dit souvent", ajoute-t-il.

Pourtant, ces mesures radicales prises pour le compte de l'écologie, comme l'augmentation du prix du carburant, ont entraîné des rebellions, comme c'est le cas avec le mouvement des Gilets Jaunes en Belgique et en France.

"Bien sûr, mais en fait je ne suis pas du tout opposé aux gilets jaunes, loin de là. Ce qui s’est passé avec les gilets jaunes, c’est que les gouvernements français, belges, etc., ont instauré une taxe sur les carburants sans proposer des alternatives, et cette taxe touche tout le monde, y compris les plus fragiles économiquement. Ce n’est donc pas du tout comme ça qu’il faut prendre les choses. Là, le seul effet que ça va provoquer, c’est que ça va provoquer le dégoût des gens pour l’écologie et on va se dire que l’écologie c’est finalement pour les riches", précise-t-il. 

On sait que la croissance à tout va provoque des désastres écologiques

Et pour lui, une politique ambitieuse pour le climat c'est "une politique systémique avec une approche vraiment globale de la société".

Il s'explique: "Ce n’est pas des pansements sur une jambe de bois, comme on le fait souvent aujourd’hui, ce ne sont pas de mesurettes qu’on a besoin, c’est vraiment un changement en profondeur de nos sociétés et un changement économique aussi, parce que la plupart des politiciens et des gouvernements aujourd’hui, surtout ceux qui tiennent au libéralisme à tout prix, tiennent vraiment à ce que la croissance soit l’objectif numéro un. La croissance, la croissance, la croissance tout le temps, la compétitivité, la concurrence, etc. Et tout ça, ce sont des règles qui valaient quand on devait produire des richesses, quand il fallait améliorer les conditions de vie des gens, et ça, ça s’est évidemment produit au siècle passé, mais aujourd’hui on sait que la croissance à tout va provoque des désastres écologiques."

"Remettre en cause le fonctionnement normal de la société"

La ministre flamande de l’Enseignement, Hilde Crevits a tweeté que même si elle salue le geste, "brosser les cours n’est pas la bonne méthode" et invite les jeunes à manifester en dehors des heures d’école.

Mais Piero Amand ne considère pas que sécher les cours, dans ce contexte là, est un problème pour son avenir. "Parce qu’en fait, quand on fait grève, c’est quelque part un acte de rébellion — si je peux dire — par rapport au fonctionnement normal de la société. On dit clairement qu’on n’ira pas en cour tant que des mesures ambitieuses ne seront pas prises. Pourquoi aller en cours si on n’a pas d’avenir ? C’est ça qu’on dit, c’est ça le message qu’on veut faire passer aux politiciens. On fera tout ce qui est en notre pouvoir pour les faire bouger, et manifester le dimanche est très positif parce qu’il y a plein de gens, vu qu’on ne travaille pas et tout ça, mais ça ne remet pas en cause le fonctionnement normal de la société."

Le 27 janvier prochain, une nouvelle marche nationale pour le climat aura lieu à Bruxelles. "Et ce genre de marche ne servent jamais à rien, mais on a clairement vu les réactions politiques après. Toute la classe politique s’est félicitée de cette marche citoyenne, engagée, même la ministre de l’Environnement, Mme Marghem, s’est félicitée. Elle est elle-même une citoyenne engagée, puisqu’elle a manifesté avec nous, mais ce n’est pas ça qu’on dit. On est contre l’inaction du gouvernement. On ne manifeste pas pour eux ni avec eux, mais on manifeste contre eux et leur déni par rapport à cette question."

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