Débat. L’école face au péril numérique

Dernière mise à jour il y a 4 ans, le 30/01/2020

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Au Ligueur, on aime le débat. Parce que c’est de là que naissent des convictions, se construisent des argumentaires solides… et même des changements de fusil d’épaule ! Cette quinzaine, on vous propose le point de vue de Valéry Witsel de la Commission Justice et Paix (justicepaix.be) sur l’école et le numérique. Et dans le prochain numéro, c’est Christophe Butstraen, médiateur scolaire et auteur du livre Internet, mes parents, mes profs et moi, qui s’exprimera sur ce même sujet.

La fièvre numérique s’empare de l’école. Les écrans sont pratiquement sur toutes les lèvres lorsqu’on parle de réforme de l’enseignement. Le Pacte d’excellence est sans équivoque : « Il s’agit d’éduquer au numérique et par le numérique ». À travers le plan stratégique Digital Wallonia 2016-2019, le gouvernement wallon entend pérenniser l’usage des TIC à tous les niveaux de l’enseignement. Pour plus de 200 membres d’institutions de l’enseignement supérieur, signataires d’une carte blanche parue le 28 août dernier dans Le Soir , il s’agit d’intégrer en profondeur « la pensée numérique » dans le monde scolaire.
Si des nuances de positions existent entre les différents promoteurs de la digitalisation dans l’enseignement, une tendance lourde vise à propager tant des équipements que des pratiques éducatives numériques, de façon transversale, aux différentes matières scolaires : des tableaux interactifs, des livres numériques, des tablettes pour les élèves, mais aussi des formations pour les enseignants et des plateformes éducatives en ligne pour que professeurs et élèves puissent continuer à interagir une fois l’école terminée.
Les slogans ne manquent pas pour promouvoir la « pensée numérique » : « Il faut adapter l’école à un monde qui bouge » ou « Faisons entrer l’école dans le XXIe siècle ». Plus sérieusement, certains théoriciens parent le numérique de nombreuses vertus : préparation au monde de l’emploi, diminution des inégalités scolaires et développement de la citoyenneté ! Les high tech constitueraient un remède miracle pour une école en crise. Pourtant, si l’on prend un peu de recul, la massification du numérique auprès de la jeunesse comprend un certain nombre de dangers pédagogiques, sanitaires, écologiques et sociaux.

Une aberration pédagogique
Selon le rapport PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) 2015 d’une enquête menée en 2012, aucune corrélation probante n’a pu être avérée entre l’utilisation du numérique à l’école et l’amélioration des résultats des élèves concernés.
« En moyenne, au cours des dix dernières années, les pays qui ont consenti d’importants investissements dans les technologies de l’information et de la communication dans le domaine de l’éducation n’ont enregistré aucune amélioration notable des résultats en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences », selon l’étude Connectés pour apprendre ? Les élèves et les nouvelles technologies de l’OCDE/PISA.
Par ailleurs, selon le même rapport, une faible utilisation des ordinateurs peut être bénéfique, la compréhension de l’écrit tend à diminuer progressivement au-delà d’un seuil d’utilisation supérieur à une ou deux fois par mois. Dans la même logique, les performances scolaires sont affectées en profondeur par un usage quotidien des écrans.
C’est peut-être la raison pour laquelle de nombreux cadres de la Silicon Valley (Google, Apple, Yahoo et Ebay) ont préféré mettre leurs enfants dans des écoles sans écran en primaire et avec un usage très parcimonieux en secondaire, conscients que les jeunes ont surtout besoin de « déconnexion » et de « temps longs » pour se concentrer, laisser de la place à leur imagination et acquérir des apprentissages fondamentaux (Source : blogs.mediapart.fr > Patrick Cahez).
Selon les professeurs de psychologie André Tricot et Franck Amadieu, l’apprentissage implique une grande place laissée à la production active des élèves. Nul besoin d’une tablette par enfant pour écrire un journal citoyen, monter une pièce de théâtre, analyser les animaux et les interactions écologiques d’un étang ou créer un potager. Au contraire, les tablettes ont tendance à renforcer un rapport passif à l’apprentissage et à faire « écran » avec le monde réel et sa complexité.
Par ailleurs, l’omniprésence des écrans pourrait avoir comme effet de déshumaniser les relations entre les personnes (enfants et adultes) qui composent les classes. Comment former de réels citoyens si « la pensée numérique » a envahi l’espace et le temps scolaires ? La toute grande majorité des psychologues s’accordent sur le fait que le développement des individus passe par des relations humaines de qualité. Bien entendu, il est nécessaire que l’ensemble des acteurs éducatifs soient ouverts aux innovations pédagogiques, mais les meilleures initiatives se passent très bien des technologies high tech.
Enfin, le renouvellement et la maintenance continue des équipements informatiques constituent un coût non négligeable. À travers le plan Digital Wallonia, le gouvernement wallon dépense 9 millions d’euro par an pour équiper des écoles qui ont répondu avec succès à un appel à projets. Dans un contexte d’enveloppe budgétaire limitée, peut-être cet argent pourrait-il faire l’objet d’un meilleur usage s’il était utilisé, par exemple, à dédoubler des classes trop nombreuses afin de permettre un meilleur accompagnement des élèves en difficulté ? Ce sont davantage d’acteurs éducatifs humains, pas de machines, dont les écoles ont besoin pour développer les apprentissages de base et réduire les inégalités.

Des dangers sanitaires
À côté de la dimension pédagogique, l’utilisation prolongée de ces technologies comporte un certain nombre de risques sanitaires. De l’autre côté de l’Atlantique, la Société canadienne et l’Académie américaine de pédiatrie s’accordent sur l’importance de ne pas dépasser deux heures d’exposition aux outils connectés pour les enfants, entre 6 et 18 ans.
En Belgique, la Fédération Wallonie-Bruxelles soutient la campagne 3-6-9-12 : maîtrisons les écrans qui préconise le seuil maximum de 2 heures entre 6 et 9 ans ; 3 heures entre 9 et 12 ans. Or, il est établi que ce temps de présence devant les écrans est déjà largement couvert par les télévisions, tablettes et autres ordinateurs que la très grande majorité des ménages possèdent aujourd’hui. Si l’on ajoute un plan numérique à l’école qui couvre la majorité des matières scolaires, à combien de temps d’exposition aux écrans arrive-t-on pour les enfants et adolescents ? Quels peuvent être les impacts sur la santé des jeunes concernés ?
Tout d’abord, on sait que les écrans abîment les yeux. Selon une étude anglaise réalisée par le King’s College de Londres auprès de personnes qui ont entre 25-29 ans en Europe, la proportion de personnes myopes a augmenté de 47 % depuis quarante ans. Cette tendance est due notamment au fait que notre œil perd l’habitude d’exercer ses muscles sur de longues distances, à cause du temps passé à l’intérieur, derrière les écrans notamment. Aussi, outre les problèmes liés à la sédentarisation, la lumière bleue - diffusée par le système d’éclairage des écrans (les LED) en proportion plus importante que la lumière naturelle - abîme la rétine, provoque des sècheresses oculaires, des maux de tête et des perturbations du sommeil.
Les machines connectées ont également des effets psychologiques importants. Des pédopsychiatres parlent d’augmentation inquiétante de troubles du langage et du comportement chez les enfants qui subissent une exposition intense aux outils connectés. Chez les adolescents, de plus en plus de médecins osent parler de « cyberdépendance », pour désigner l’addiction aux réseaux sociaux, aux jeux vidéo, aux achats en ligne ou à internet en général.
À ces phénomènes sont liés des problèmes de dépression, de dégradation des relations sociales et… des performances scolaires. Pour ces jeunes qui ont déjà dépassé les seuils d’écran recommandables par les professionnels de la santé, nos décideurs politiques se proposent donc de rajouter une couche avec de « grands projets numériques » pour l’école. Comme le pointent avec justesse certains enseignants français réunis autour d’une carte blanche de 2015 : « C’est bien la première fois qu’on préconise l’augmentation des doses dans un problème d’addiction ».
Pour compléter le tableau sanitaire, nous n’avons pas encore assez de recul temporel pour mesurer l’ampleur des risques que comportent les ondes électro-magnétiques dont nous sommes traversés chaque jour avec nos appareils connectés. Dans le doute, il serait sage d’adapter le « principe de précaution » pour des endroits où les enfants passent la moitié de leur temps éveillé.
En plus de ces points d’attention pédagogiques et sanitaires préoccupants pour la jeunesse, d’autres éléments posent question. On peut penser aux scandales sociaux et écologiques liés à l’extraction des minerais nécessaires à la fabrication de nos outils high tech. À cet égard, la Commission Justice et Paix met en évidence les nombreuses atteintes aux droits humains des communautés qui vivent autour de l’exploitation des mines de coltan, à l’est de la R.D. du Congo : travail des enfants dans les mines, conditions de travail dégradantes, violence sexuelle à l’égard des femmes, pollution en métaux lourds des sols... Pour une politique qui ambitionne en même temps « le développement d’une citoyenneté active » chez les jeunes, tout plan de digitalisation massive entre en totale contradiction avec cette noble intention.
Pour conclure, plutôt que d’amplifier les effets délétères d’un monde ultra-connecté où règne la culture de l’immédiateté, l’école devrait, au contraire, assumer son rôle protecteur face aux dangers pédagogiques, sanitaires, relationnels, sociaux et écologiques de cette fascination collective pour le high tech.
Le véritable progrès d’une société ne se définit pas avant tout par un alignement instinctif sur les dernières technologies, mais bien par l’amélioration des conditions d’épanouissement de ses membres. Nous plaidons donc pour une présence du numérique extrêmement circonscrite dans le temps (pas plus de 2 heures par mois). À cette condition seulement, l’école pourra mener à bien ses deux principales missions : le développement des apprentissages de base et des fondements citoyens essentiels à la vie en société.
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Au Ligueur, on aime le débat. Parce que c’est de là que naissent des convictions, se construisent des argumentaires solides… et même des changements de fusil d’épaule ! Cette quinzaine, on vous propose le point de vue de Valéry Witsel de la Commission Justice et Paix (justicepaix.be) sur l’école et le numérique. Et dans le prochain numéro, c’est Christophe Butstraen, médiateur scolaire et auteur du livre Internet, mes parents, mes profs et moi, qui s’exprimera sur ce même sujet.

La fièvre numérique s’empare de l’école. Les écrans sont pratiquement sur toutes les lèvres lorsqu’on parle de réforme de l’enseignement. Le Pacte d’excellence est sans équivoque : « Il s’agit d’éduquer au numérique et par le numérique ». À travers le plan stratégique Digital Wallonia 2016-2019, le gouvernement wallon entend pérenniser l’usage des TIC à tous les niveaux de l’enseignement. Pour plus de 200 membres d’institutions de l’enseignement supérieur, signataires d’une carte blanche parue le 28 août dernier dans Le Soir , il s’agit d’intégrer en profondeur « la pensée numérique » dans le monde scolaire.
Si des nuances de positions existent entre les différents promoteurs de la digitalisation dans l’enseignement, une tendance lourde vise à propager tant des équipements que des pratiques éducatives numériques, de façon transversale, aux différentes matières scolaires : des tableaux interactifs, des livres numériques, des tablettes pour les élèves, mais aussi des formations pour les enseignants et des plateformes éducatives en ligne pour que professeurs et élèves puissent continuer à interagir une fois l’école terminée.
Les slogans ne manquent pas pour promouvoir la « pensée numérique » : « Il faut adapter l’école à un monde qui bouge » ou « Faisons entrer l’école dans le XXIe siècle ». Plus sérieusement, certains théoriciens parent le numérique de nombreuses vertus : préparation au monde de l’emploi, diminution des inégalités scolaires et développement de la citoyenneté ! Les high tech constitueraient un remède miracle pour une école en crise. Pourtant, si l’on prend un peu de recul, la massification du numérique auprès de la jeunesse comprend un certain nombre de dangers pédagogiques, sanitaires, écologiques et sociaux.

Une aberration pédagogique
Selon le rapport PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) 2015 d’une enquête menée en 2012, aucune corrélation probante n’a pu être avérée entre l’utilisation du numérique à l’école et l’amélioration des résultats des élèves concernés.
« En moyenne, au cours des dix dernières années, les pays qui ont consenti d’importants investissements dans les technologies de l’information et de la communication dans le domaine de l’éducation n’ont enregistré aucune amélioration notable des résultats en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences », selon l’étude Connectés pour apprendre ? Les élèves et les nouvelles technologies de l’OCDE/PISA.
Par ailleurs, selon le même rapport, une faible utilisation des ordinateurs peut être bénéfique, la compréhension de l’écrit tend à diminuer progressivement au-delà d’un seuil d’utilisation supérieur à une ou deux fois par mois. Dans la même logique, les performances scolaires sont affectées en profondeur par un usage quotidien des écrans.
C’est peut-être la raison pour laquelle de nombreux cadres de la Silicon Valley (Google, Apple, Yahoo et Ebay) ont préféré mettre leurs enfants dans des écoles sans écran en primaire et avec un usage très parcimonieux en secondaire, conscients que les jeunes ont surtout besoin de « déconnexion » et de « temps longs » pour se concentrer, laisser de la place à leur imagination et acquérir des apprentissages fondamentaux (Source : blogs.mediapart.fr > Patrick Cahez).
Selon les professeurs de psychologie André Tricot et Franck Amadieu, l’apprentissage implique une grande place laissée à la production active des élèves. Nul besoin d’une tablette par enfant pour écrire un journal citoyen, monter une pièce de théâtre, analyser les animaux et les interactions écologiques d’un étang ou créer un potager. Au contraire, les tablettes ont tendance à renforcer un rapport passif à l’apprentissage et à faire « écran » avec le monde réel et sa complexité.
Par ailleurs, l’omniprésence des écrans pourrait avoir comme effet de déshumaniser les relations entre les personnes (enfants et adultes) qui composent les classes. Comment former de réels citoyens si « la pensée numérique » a envahi l’espace et le temps scolaires ? La toute grande majorité des psychologues s’accordent sur le fait que le développement des individus passe par des relations humaines de qualité. Bien entendu, il est nécessaire que l’ensemble des acteurs éducatifs soient ouverts aux innovations pédagogiques, mais les meilleures initiatives se passent très bien des technologies high tech.
Enfin, le renouvellement et la maintenance continue des équipements informatiques constituent un coût non négligeable. À travers le plan Digital Wallonia, le gouvernement wallon dépense 9 millions d’euro par an pour équiper des écoles qui ont répondu avec succès à un appel à projets. Dans un contexte d’enveloppe budgétaire limitée, peut-être cet argent pourrait-il faire l’objet d’un meilleur usage s’il était utilisé, par exemple, à dédoubler des classes trop nombreuses afin de permettre un meilleur accompagnement des élèves en difficulté ? Ce sont davantage d’acteurs éducatifs humains, pas de machines, dont les écoles ont besoin pour développer les apprentissages de base et réduire les inégalités.

Des dangers sanitaires
À côté de la dimension pédagogique, l’utilisation prolongée de ces technologies comporte un certain nombre de risques sanitaires. De l’autre côté de l’Atlantique, la Société canadienne et l’Académie américaine de pédiatrie s’accordent sur l’importance de ne pas dépasser deux heures d’exposition aux outils connectés pour les enfants, entre 6 et 18 ans.
En Belgique, la Fédération Wallonie-Bruxelles soutient la campagne 3-6-9-12 : maîtrisons les écrans qui préconise le seuil maximum de 2 heures entre 6 et 9 ans ; 3 heures entre 9 et 12 ans. Or, il est établi que ce temps de présence devant les écrans est déjà largement couvert par les télévisions, tablettes et autres ordinateurs que la très grande majorité des ménages possèdent aujourd’hui. Si l’on ajoute un plan numérique à l’école qui couvre la majorité des matières scolaires, à combien de temps d’exposition aux écrans arrive-t-on pour les enfants et adolescents ? Quels peuvent être les impacts sur la santé des jeunes concernés ?
Tout d’abord, on sait que les écrans abîment les yeux. Selon une étude anglaise réalisée par le King’s College de Londres auprès de personnes qui ont entre 25-29 ans en Europe, la proportion de personnes myopes a augmenté de 47 % depuis quarante ans. Cette tendance est due notamment au fait que notre œil perd l’habitude d’exercer ses muscles sur de longues distances, à cause du temps passé à l’intérieur, derrière les écrans notamment. Aussi, outre les problèmes liés à la sédentarisation, la lumière bleue - diffusée par le système d’éclairage des écrans (les LED) en proportion plus importante que la lumière naturelle - abîme la rétine, provoque des sècheresses oculaires, des maux de tête et des perturbations du sommeil.
Les machines connectées ont également des effets psychologiques importants. Des pédopsychiatres parlent d’augmentation inquiétante de troubles du langage et du comportement chez les enfants qui subissent une exposition intense aux outils connectés. Chez les adolescents, de plus en plus de médecins osent parler de « cyberdépendance », pour désigner l’addiction aux réseaux sociaux, aux jeux vidéo, aux achats en ligne ou à internet en général.
À ces phénomènes sont liés des problèmes de dépression, de dégradation des relations sociales et… des performances scolaires. Pour ces jeunes qui ont déjà dépassé les seuils d’écran recommandables par les professionnels de la santé, nos décideurs politiques se proposent donc de rajouter une couche avec de « grands projets numériques » pour l’école. Comme le pointent avec justesse certains enseignants français réunis autour d’une carte blanche de 2015 : « C’est bien la première fois qu’on préconise l’augmentation des doses dans un problème d’addiction ».
Pour compléter le tableau sanitaire, nous n’avons pas encore assez de recul temporel pour mesurer l’ampleur des risques que comportent les ondes électro-magnétiques dont nous sommes traversés chaque jour avec nos appareils connectés. Dans le doute, il serait sage d’adapter le « principe de précaution » pour des endroits où les enfants passent la moitié de leur temps éveillé.
En plus de ces points d’attention pédagogiques et sanitaires préoccupants pour la jeunesse, d’autres éléments posent question. On peut penser aux scandales sociaux et écologiques liés à l’extraction des minerais nécessaires à la fabrication de nos outils high tech. À cet égard, la Commission Justice et Paix met en évidence les nombreuses atteintes aux droits humains des communautés qui vivent autour de l’exploitation des mines de coltan, à l’est de la R.D. du Congo : travail des enfants dans les mines, conditions de travail dégradantes, violence sexuelle à l’égard des femmes, pollution en métaux lourds des sols... Pour une politique qui ambitionne en même temps « le développement d’une citoyenneté active » chez les jeunes, tout plan de digitalisation massive entre en totale contradiction avec cette noble intention.
Pour conclure, plutôt que d’amplifier les effets délétères d’un monde ultra-connecté où règne la culture de l’immédiateté, l’école devrait, au contraire, assumer son rôle protecteur face aux dangers pédagogiques, sanitaires, relationnels, sociaux et écologiques de cette fascination collective pour le high tech.
Le véritable progrès d’une société ne se définit pas avant tout par un alignement instinctif sur les dernières technologies, mais bien par l’amélioration des conditions d’épanouissement de ses membres. Nous plaidons donc pour une présence du numérique extrêmement circonscrite dans le temps (pas plus de 2 heures par mois). À cette condition seulement, l’école pourra mener à bien ses deux principales missions : le développement des apprentissages de base et des fondements citoyens essentiels à la vie en société.
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