Les ingrédients du Parlement bruxellois


Lorsque le verdict des élections du 26 mai est tombé, les regards ont surtout été attirés par la répartition des sièges entre partis. Mais d’autres critères sont également pertinents pour saisir ce qui fera et ce que fera le Parlement : sexe, âge, lieu de résidence, ancrage communal ou expérience parlementaire antérieure sont en effet d’autres paramètres qui peuvent avoir un impact sur le travail parlementaire. Examinons donc la composition du Parlement sous ces divers angles.

Les statistiques qui suivent ont été calculées sur la base des 89 élu·es. Une partie de ces personnes quittera le Parlement dans les prochaines semaines ou les prochains mois pour devenir ministre ou ne rester que bourgmestre ou échevin·e. Il faudra alors voir si cela modifie sensiblement certains traits du Parlement.

54 % de nouvelles têtes au Parlement

54 % de nouvelles têtes, cela signifie que 46 % des élu·es étaient déjà dans le Parlement ou le Gouvernement bruxellois sortants. 7 des 8 ministres ou secrétaires se représentaient. Ils ont été réélus. Mais 11 des 45 parlementaires sortants qui se représentaient n’ont pas été réélus. On compte 5 francophones (les PS Véronique Jamoulle, Simone Susskind, Kenza Yacubi et Bea Diallo ; le cdH Ahmed El Khannouss) et 6 néerlandophones (les CD&V Paul Delva et Brigitte Grouwels ; les Open VLD Khadija Zamouri et Stefan Cornelis ; le N-VA Johan Van den Driessche et le Groen ! Bruno de Lille).

Certain·es pourraient être repêché·es du fait que des parlementaires entreront au Gouvernement ou choisiront de ne pas cumuler leur poste au Parlement avec celui de bourgmestre ou d’échevin.

Beaucoup de parlementaires cumulent commune et région

L’assemblée parlementaire aurait pu n’être composée que de mandataires communaux puisqu’il y avait sur les listes 2,2 fois plus de mandataires communaux que de sièges à pourvoir (197 candidat·es pour 89 sièges). De nombreux non mandataires ont pourtant réussi à se glisser dans l’hémicycle. Ils ne représentent cependant que 30 % des élu·es. Ils étaient nombreux sur les listes, mais avec une probabilité nettement inférieure d’être élus (5,2 % contre 31 % pour les mandataires)

A noter que sur les 62 élu·es impliqué·es dans la gestion communale, 10 sont bourgmestre ou échevin·e. Plusieurs de ces personnes pourraient choisir de ne pas cumuler et de laisser ainsi leur lace à un·e suppléant·e.

Aucun pont entre le Parlement et les conseils communaux de Saint-Gilles et Woluwe-Saint-Lambert

Nombreux sont les parlementaires bruxellois qui ont également un mandat communal. Et pourtant, certains conseils communaux n’envoient aucun·e de ses membres au Parlement. C’est le cas de Woluwe-Saint-Lambert et de Saint-Gilles. À l’opposé, Bruxelles en envoie 10, ce qui est cependant plus ou moins proportionnel à sa population en âge de voter.

Les communes de Ganshoren, Evere, Woluwe-Saint-Pierre et Forest ont, quant à elles, une représentation parlementaire importante, sans commune mesure avec leur taille, tandis qu’Ixelles et Anderlecht se trouvent dans une situation inverse de sous-représentation.

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Les plus jeunes sont sous-représenté·es… et les plus âgé·es totalement absent·es

Le Parlement bruxellois reste l’affaire des 35-54 ans. Cette tranche d’âge occupe en effet deux-tiers des strapontins, soit presque deux fois plus que son poids dans la population en âge de voter (33,9 %). Les deux classes d’âge qui les suivent ou les précèdent sont, quant à elles, raisonnablement représentées : les 25-34 et 55-64 ans envoient en effet un nombre de parlementaires équivalant à leur poids dans la population. Mais les plus jeunes et les plus vieux sont nettement sous-représentés. Les 18-24 ans ne pèsent que 2,2 % au Parlement alors qu’ils représentent 10,2 % des votants. Cet écart va d’ailleurs encore s’accentuer à mesure que les parlementaires vont vieillir en cours de législature. Quant aux plus vieux, la distorsion est encore plus forte puisqu’un seul parlementaire ( Pierre Kompany ) compte plus de 65 ans, alors que cette classe d’âge représente près du quart de la population en âge de voter (23,5 %).

Ces statistiques soulèvent deux questions : comment accentuer encore la place des plus jeunes ? comment réserver une place aux plus âgé·es sans pour autant promouvoir les carrières interminables de politicien·nes professionnel·les et en privilégiant donc plutôt des candidatures de personnes plus âgées mais néophytes en politique ?

Pas encore tout à fait une moitié de femmes

Parité sur les listes ne signifie pas encore parité sur les bancs du Parlement. On comptait, du fait de la règle de la « tirette », 49,67 % de femmes sur les listes. Or, il n’y a « que » 43,8 % d’élues. Sur ce point, le Parlement bruxellois ne se différencie guère des autres assemblées élues ce 26 mai 2019. En effet, le taux de 43,8 % correspond exactement à la moyenne observée dans l’ensemble des assemblées parlementaires belges.

Mais l’écart entre hommes et femmes n’est pas anodin. Il apparaît plus nettement lorsqu’on regarde les chiffres absolus plutôt que les pourcentages. Le Parlement bruxellois compte en effet 39 élues pour 50 élus. Soit 11 unités d’écart. Mais il y a une légère progression : de 36 en 2014, elles sont aujourd’hui 39 (passant ainsi de 40,5% à 43,8%).

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Autres chiffres



Faut-il avoir fait le droit pour être député ?

Nos informations sur les études qu’ont suivies les parlementaires sont incomplètes, mais elles interpellent. D’abord – et ce n’est guère une surprise – la proportion de député·es ayant suivi une maîtrise est nettement supérieure à la moyenne observée dans la population en âge de voter. Nous savons en effet qu’au moins 61 % des député·es détiennent un diplôme de maîtrise. A comparer avec les statistiques de la population en âge de voter : selon les calculs de l’IBSA en 2016, 41 % des Bruxellois de plus de 25 ans détenaient un diplôme d’enseignement supérieur (maîtrise ou baccalauréat). Cette population est donc surreprésentée au Parlement. Le différentiel est d’ailleurs supérieur que ce que laisse imaginer le rapport entre 61 et 41 %. Puisque, dans les 41 %, sont inclus les détenteurs d’un baccalauréat et que le nombre réel de député·es détenant une maîtrise est certainement plus élevé car nous ignorons quel est le niveau de formation de la plupart des autres député·es.

Au sein de ce sous-groupe de personnes dont on sait qu’elles détiennent un master, il est frappant d’observer que le domaine d’études le plus fréquent est – de loin – le droit : plus de 40 % des personnes pour lesquelles nous avons l’information ont en effet suivi cette filière. C’est nettement plus que les sciences politiques. Toutes les autres disciplines citées au moins deux fois relèvent du secteur des sciences humaines. Cela peut sembler presque logique si l’on considère la politique comme une activité professionnelle. Mais pourquoi des citoyens ayant suivi des études en sciences de la santé ou en sciences et technologies ne prendraient-ils pas aussi part à la délibération parlementaire ? Sans compter celles et ceux qui n’ont pas fait d’études supérieures ou se sont limité·es à un baccalauréat.

Des différences sensibles selon les partis

Déjà à propos de la constitution des listes, nous avions souligné combien les stratégies pouvaient différer selon les partis. Ces différences ne tenaient pas seulement au fait qu’ils disposaient dans leurs rangs d’aucun, de peu ou de beaucoup de ministres, parlementaires ou mandataires communaux. D’autres facteurs intervenaient puisque des partis ayant des effectifs similaires n’y puisaient pas de la même manière pour composer leurs listes.

Des différences, il y en a aussi lorsqu’on observe les listes d’élu·es. Le tableau ci-contre en témoigne. Il situe chaque parti par rapport à 7 critères. Plus les couleurs sont foncées, plus cela indique que le parti a, pour cet indicateur, des indices supérieurs à la moyenne mentionnée en bas de colonne. Chacun de ces indicateurs peut être vu comme une mesure du degré de « conservatisme » du parti, les élus de ce parti étant plus souvent des parlementaires ou ministres sortants, des mandataires communaux, des hommes plutôt que des femmes, ou des personnes de plus de 50 ans.

Partis et individus


Autres chiffres sur les élections régionales bruxelloises :